mercredi 25 janvier 2012

EAA, Entretiens Annuels d’Activité

Pour la direction de Thales la période des EAA est un moment fort de la gestion des ressources humaines. Pour les salariés, ce n’est pas toujours un moment agréable…

Chaque année, les représentants du personnel comme par exemple ceux du CHSCT sont interpellés par des salariés de TMI qui viennent de passer leur entretien. Nous savons qu’il y a des entretiens qui se passent bien mais notre rôle est de nous focaliser sur ceux qui se passent mal.

COMMENT doit se passer l’EAA ?
Lors de plusieurs réunions de la commission RPS nous avons expliqué que l’EAA pouvait être à l’origine de souffrance au travail. Une souffrance que seul le refus du salarié de passer cet entretien peut éviter. Voici ce que la direction nous a répondu :

  • l’EAA doit être un moment positif. Si un salarié préfère éviter d’y participer parce qu’il pense à tord où à raison qu’il va mal se passer, il a le droit de le refuser.
  • Même si le pourcentage de tenu des EAA est un indicateur du Blue Book de Thales qui liste les objectifs à atteindre, personne à la direction des ressources humaines ne reçoit de prime ou bonus sur l’atteinte de cet objectif.

A ces affirmations, s’ajoutent les consignes de la direction des ressources humaines du groupe. Chaque année, une lettre de cadrage est discutée entre les organisations syndicales et la direction des ressources humaines de Thales France. La lettre de cadrage de Loïc MAHE indique pour cette année que :

  • Même si l’EAA est formalisé par un outil informatique intégré à People1st, l’utilisation de ce logiciel n’est aucunement obligatoire.
  • Même si les EAA sont réalisés pendant la période d’attribution des augmentations, ils n’ont pas comme finalité essentielle la définition de la politique salariale.
  • En aucun cas il ne doit y avoir de pourcentage de répartition entre les différents niveaux (on parle de Ranking ou Forced Ranking), la répartition ne pouvant être faite qu’à posteriori.

Pour notre part, suite aux remarques entendus, nous ne pouvons que conseiller aux managers et aux salariés qui souhaitent passer leur entretien :
  • D’éviter d’utiliser les boxes vitrés qui se trouvent à proximité des zones de passages. Les entretiens doivent se passer dans un lieu calme, à l’abri des regards indiscrets.
  • De choisir une date et un horaire où les 2 interlocuteurs sont réellement disponibles.
  • D’éviter d’aborder les événements qui n’ont pas préalablement fait l’objet d’un échange suffisamment long pour qu’ils soient considérés par les 2 parties comme soldés.
POURQUOI passer un EAA ?
Il n’est pas absurde de s’interroger sur l’intérêt des EAA. Après une quinzaine d’année de généralisation, ils sont de plus en plus controversés. On trouvera en vrac, la non-pertinence des critères retenus, leur manque de transparence, la possibilité de mettre en concurrence des collaborateurs via des échelles de performance (Ranking), la prise en compte d’indicateurs comportementaux et pas seulement ceux du travail, la pratique quasi systématique de l’autoévaluation, l’évaluation de l’adhésion à des « valeurs » qui se sont pas nées du libre arbitre, l’absence de procédure d’appel en cas de divergence de point de vue, la tentation de sur-intensification du travail d’un salarié pour augmenter ses chances d’être bien noté, la limite d’une libre expression des salariés due au lien de subordination, etc.

Des dérives ont été recadrées par des tribunaux qui ont constaté des liens de cause à effet entre entretiens et dépressions au motif que des critères comportementaux détachés de toute effectivité du travail accompli pouvaient être préjudiciables à la santé mentale des salariés. Des tribunaux ont aussi recadré des dérives vers des critères comportementaux qui n’étaient pas « objectifs, vérifiables et transparents ».

ET à Thales ?
L’auto-évaluation du salarié ou le choix de la période sont loin de faire l’unanimité mais ce n’est pas tout. Les « valeurs » du groupe, sur le respect desquelles les salariés sont évalués, sont aussi contestées notamment :
  • « Avoir l’obsession du client. » L’obsession est au minimum une névrose et il paraît étonnant qu’un groupe industriel nous évalue sur notre capacité à être malade.
  • « Innover, décider et agir avec rapidité. » La rapidité est un critère relatif qui est difficilement quantifiable. Dans cette dernière valeur, y est précisé que le salarié « assume la responsabilité de ses décisions » tout en sachant « prendre des risques calculés ». La direction de Thales laisse ainsi entendre que l’évaluation pourrait avoir une finalité disciplinaire étrangère à la finalité de l’évaluation qui est l’appréciation des aptitudes professionnelles.

La direction répondra peut-être qu’elle travaille à de nouvelles valeurs mais il y a d’autres choses encore dans le système d’évaluation de Thales qui sont contestées. Le syndicat SUPPer (Groupe Solidaire) a d’ailleurs envoyé en novembre 2011 une lettre très argumentée à Loïc MAHE et Pierre GROISY, les DRH de Thales, demandant la révision de People1st.

Les EAA ont déjà fait couler beaucoup d’encre et un seul tract ne suffira pas à en explorer tous les aspects. D’ailleurs, ils ne sont que la partie la plus visible d’un type d’organisation reconnue comme stressant. Participer ou pas aux EAA est un choix personnel mais nous ne pouvons que recommander aux salariés qui se sentiraient exposés à une évaluation arbitraire de s’abstenir. C’est une mesure de bon sens, il est inutile de s’exposer inutilement à un risque.

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